il lui avait manqué.
La mer était basse, et le soleil rendait ce dimanche plus doux après deux mois d’absence et de froid.
Les promeneurs flânaient en famille.
C’était l’après-midi. On entendait à peine le cri des mouettes survolant la mer glacée à marée basse. Quelques empreintes des goélands, témoins éphémères d’un passage terrestre, dessinaient un chemin. Le soleil d’hiver balayait sur la côte de nacre des reflets argentés.
Maddie et Charles marchaient entre les bancs de sable sec et humide, ils se regardaient à peine, seuls au milieu du monde. Leur présence était forte l’une pour l’autre comme dans ces moments rares dont on sait qu’ils marqueront d’une saveur singulière l’existence.
Elle avait marché sur un coeur dessiné probablement par des enfants et elle avait souri. Elle aimait penser qu’il s’agissait d’un présage ou d’une validation que l’instant était juste. Maddie était à la fois excitée, heureuse et intimidée. La légèreté côtoyait la gravité. Si elle ne pensait pas à l’amour, elle pressentait que le moment était spécial.
Il y a des êtres qui vous bousculent sans vraiment savoir pourquoi, dès le premier regard.
C’est alors le corps qui parle en premier comme si les âmes se reconnaissaient avant même que vous ayez eu le temps de comprendre, d’analyser, de formater, d’expliquer. Puis très vite, le cerveau reprend les commandes pour contrôler et sécuriser, aiguiller vers une case.
Il est possible que cela se soit passé ainsi pour tous les deux. Tout les rapprochait hormis les schémas attendus d’une société.
Maddie ne voulait que du beau, de l’authentique du profond. Ses yeux verdis par l’hiver cherchait la profondeur de son regard plus sombre. Charles lui, cherchait dans sa tête, les mots alignés à son ressenti. Tous deux ne s’étaient pas envisagés sous cet angle, ou alors de manière fugace quand le désir s’invitait malgré eux comme un délice. Face à l’intensité du lien, à cette complétude, nul besoin de mettre une étiquette, impossible même, tant la vie en dépasserait par le moindre côté.
Il n’y avait plus qu’à se laisser cueillir sans rien n’attendre.
Maddie se souvenait d’un jour où il lui avait exprimé: « tu sais que je commence à t’aimer, vraiment beaucoup ». Elle se souvenait combien son cœur avait bondi, reconnaissant immédiatement la profondeur du lien.
Elle lui avait manquée.
Il était venu la chercher et il avait eu raison. Charles avait laissé tomber les masques pour sonder son émotion.
Il avait posé sur ses mots avec courage, la caresse de l’élégance, et dans son regard, Maddie ressentait la douceur et le respect.
l’authenticité simplement d’être sans rien attendre, juste exprimer l’alignement des coeurs.
Ils étaient restés silencieux devant la mer éternelle, contemplant l’horizon sans savoir de quoi serait fait demain:
De la beauté.
Carole Hersent
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